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Intestin perméable  Étanchéifier la barrière

  • Intestin perméable  Étanchéifier la barrière
Article paru dans le journal nº 75

Il y a peu, un médecin qui vous diagnostiquait le syndrome de l’intestin perméable faisait au mieux rire la cantonade. Aujourd’hui, ce nouveau paradigme s’est enfin révélé, preuve qu’une vérité met toujours du temps avant de s’imposer. Puisque c’est chose faite, voyons les traitements naturels pour le traiter.

"Jusqu’à" coeur récemment, le « leaky gut syndrome », à savoir le syndrome de l’intestin perméable, n’existait pas en tant que diagnostic dans la pratique médicale régulière. Pire, on prenait pour un charlatan celui qui, parmi les médecins et autres thérapeutes, s’aventurait à poser un tel diagnostic aux maux dont souffraient leurs patients. Quant à la « santé intestinale » ou la santé gastro-intestinale, elle est longtemps restée le parent pauvre de la santé. Fort heureusement, la situation évolue. Aujourd’hui, qu’une perméabilité anormale de l’intestin puisse s’accompagner d’un ensemble de signes cliniques et de symptômes (autrement dit d’un syndrome) dans l’intestin mais aussi dans le reste de l’organisme commence à être accepté dans le secteur médical. C’est d’autant plus appréciable que ledit syndrome touche l’intestin – certes – mais aussi le reste de l’organisme. Intégrer ce diagnostic dans la pratique médicale permet à n’importe quel médecin d’associer les origines d’une poussée d’acné, d’eczéma, d’allergie saisonnière, d’asthme, ou encore de douleur articulaire à l’intestin…

La barrière intestinale, c’est une superficie de 32 mètres carrés, formant la frontière entre « l’extérieur » et « l’intérieur ». Celle-ci garantit le passage des aliments et des liquides et l’exclusion des substances nocives. C’est quand est altérée cette fonction quasi douanière que l’on parle de perméabilité intestinale.

En temps normal, l’épithélium intestinal (muqueuse intestinale) est capable grâce à sa structure particulière et à ses cellules spécialisées, d’assurer la fonction de barrière. Temps normal rime avec les bactéries intestinales probiotiques qui ­colonisent la muqueuse intestinale, ainsi que le système immunitaire de la muqueuse intestinale. Ils jouent un rôle essentiel pour maintenir l’intégrité de la barrière intestinale.

Drôle de syndrome

Un intestin hyperperméable se caractérise par une perméabilité intestinale perturbée qui persiste à long terme et qui entraîne des maladies. La perméabilité intestinale est un processus régulé, à la fois strict et complexe. Les cellules épithéliales de la muqueuse intestinale sont reliées entre elles par des jonctions serrées et des jonctions adhérentes. Dans certaines conditions, ces jonctions serrées (Tight Junctions) se lâchent temporairement, lorsqu’un nutriment doit pouvoir passer. Des transporteurs spécifiques présents dans la membrane des cellules épithéliales assurent l’absorption active des nutriments. Dans le cas du syndrome de l’intestin perméable, la fonction régulatrice des jonctions serrées et des jonctions adhérentes est perturbée pendant une période prolongée, ce qui entraîne une perméabilité intestinale accrue.

Problème de jonctions

Les deux types de jonctions sont constitués d’un complexe de protéines fonctionnelles, dont l’occludine, les claudines et les ­cadhérines. La zonuline est une substance qui, dans certaines circonstances, peut endommager les jonctions ce qui a pour conséquence de laisser passer des particules indésirables de l’intestin et dans la circulation sanguine.

Les bactéries et le gluten sont des déclencheurs importants pouvant libérer de la zonuline et aboutir une hyperperméabilité de l’intestin. Parmi les autres facteurs qui peuvent entraîner à un déséquilibre de la fonction barrière, on peut citer une ­alimentation riche en graisses et en fructose, pauvre en fibres, ainsi que des processus inflammatoires chroniques comme l’arthrose et les rhumatismes (voir encadré p. 28). Une alimentation riche en graisses et en glucides entraîne des bouleversements délétères dans la barrière intestinale, les aliments riches en flavonoïdes issus de fruits et de légumes – dont en particulier la quercétine –, augmentent l’intégrité de la barrière intestinale.

Outre une fonction perturbée des ­jonctions serrées, il est également ­question d’un équilibre perturbé dans le ­renouvellement des cellules épithéliales. À l’apex (autrement dit au sommet) des villosités intestinales a lieu un ­renouvellement cellulaire continuel des cellules épithéliales intestinales. Ce ­renouvellement de l’épithélium s’effectue selon un schéma en tapis roulant, du fond des cryptes, où se concentrent les cellules souches qui donnent naissance à des cellules progénitrices qui migrent ensuite jusqu’à l’apex des villosités où les cellules différenciées se détachent par exfoliation. En cas d’inflammations chroniques de l’intestin, les cellules épithéliales se détachent trop rapidement l’une après l’autre, souvent même plusieurs à la fois, ce qui crée une ouverture qui ne peut plus être comblée temporairement par les cellules voisines. Ces ouvertures ou micro-érosions temporaires augmentent anormalement la perméabilité de la muqueuse intestinale, et contribuent à de nouveaux processus inflammatoires, qui ont lieu non seulement au niveau de la paroi intestinale, mais dans tout l’organisme.

Conséquences sanitaires

Un intestin hyperperméable peut être à la source et (ou) aggraver des maladies chroniques, des affections allergiques, le syndrome de fatigue chronique, la dépression et autres rhumatismes. L’augmentation de la perméabilité intestinale joue un rôle causal dans le syndrome du côlon irritable, la maladie de Crohn et la colite ulcéreuse. Cependant, on soupçonne que l’intestin hyperperméable peut jouer un rôle dans bien d’autres affections comme la ­schizophrénie, la maladie de Parkinson et d’Alzheimer, l’artériosclérose, la sclérose en plaques.

Comme son nom l’indique, le syndrome de l’intestin perméable est un ensemble de symptômes. S’ils peuvent souvent varier d’une personne à une autre, il se caractérise par un cercle vicieux. Un intestin hyperperméable causé par une maladie inflammatoire entretiendra justement cette maladie. En outre, lorsque la paroi intestinale est devenue plus perméable, les AGE (acides gras essentiels) provenant des aliments qui ont pu passer la paroi deviendront à leur tour une source de processus inflammatoires, par exemple au niveau de la paroi vasculaire, ce qui joue un rôle dans le développement de l’athérosclérose D’où l’importance de restaurer la barrière intestinale.

Options de traitements

Divers antioxydants et autres nutriments peuvent restaurer les jonctions serrées lorsqu’ils sont pris sous forme de complément alimentaire. Il s’agit de nutriments pour les cellules intestinales, en particulier la glutamine et l’acide butyrique, ainsi que des nutriments à action anti-inflammatoire et antioxydante, appelés des NAIOS (substances naturelles anti-inflammatoires et antioxydantes). Il s’agit là encore de la glutamine, mais aussi du zinc et de la N-acétyle-cystéine (lire encadré p. 27). Par ailleurs, il est également utile de prendre des prébiotiques et probiotiques.

La glutamine

L’acide aminé glutamine est à l’heure actuelle le moyen le plus étudié pour améliorer la perméabilité intestinale. Il a été démontré qu’une carence en glutamine provoque l’hyperperméabilité intestinale. La glutamine est le nutriment préféré des cellules intestinales où elle travaille ensemble avec d’autres acides aminés, tels que la leucine et l’arginine pour sauvegarder la santé de la barrière intestinale. En outre, elle offre une activité ­antioxydante importante qui peut réduire la nocivité des réactions inflammatoires à la fonction des jonctions serrées.

Même chez les patients gravement malades, la glutamine réduit le risque de septicémie par la translocation de ­bactéries à partir de l’intestin après une chirurgie abdominale et améliore les ­allergies chez les bébés prématurés ­pendant la première année de vie.

La glutamine réduit également les dommages que les anti-inflammatoires non stéroïdiens, peuvent causer à l’épithélium intestinal. Il est donc important de maintenir la fonction de barrière des jonctions serrées contre les micro-­organismes et de réduire les processus inflammatoires dans l’intestin ou leurs conséquences. En stimulant la production de claudines, la quercétine protège également les jonctions serrées.

Le zinc

Le zinc est un élément essentiel à la ­cicatrisation des plaies et au maintien de muqueuses saines. Il joue donc un rôle important dans la restauration de l’intégrité de la barrière intestinale et des autres barrières muqueuses. Cet effet a été démontré dans des études expérimentales où la supplémentation alimentaire en zinc a favorisé la restauration d’une paroi intestinale endommagée. L’importance du zinc est également illustrée par le fait qu’une carence en zinc peut avoir de graves conséquences pour la structure et la fonction de la muqueuse de l’intestin grêle, en particulier pour les villosités intestinales où a lieu l’absorption des nutriments. Une carence en zinc perturbe la capacité de l’épithélium des villosités intestinales à se renouveler et entraîne des changements non fonctionnels. Une perméabilité intestinale accrue peut aggraver davantage la carence en zinc en réduisant l’absorption du zinc.

Le zinc joue également un rôle essentiel dans le système immunitaire d’entre autres la muqueuse intestinale, ce qui est important lorsque les bactéries de l’intestin pénètrent l’organisme par des jonctions serrées endommagées. Le zinc fait également partie des enzymes ­antioxydantes du système antioxydant de l’organisme. Une carence en zinc entraîne donc des perturbations de la muqueuse du tractus gastro-intestinal et un ­dysfonctionnement du système ­immunitaire, ce qui signifie que les ­bactéries et les substances nocives de l’intestin ne seront pas efficacement retenues et rendues inoffensives.

Prébiotiques, probiotiques

Une flore intestinale saine est essentielle pour le bon fonctionnement de la barrière intestinale et des jonctions serrées ainsi que pour la perméabilité intestinale. Les prébiotiques et les probiotiques ­travaillent en étroite collaboration avec le système immunitaire de la muqueuse intestinale et soutiennent même son ­développement normal. En cas d’un intestin hyperperméable, le système immunitaire réagit aux micro-organismes envahisseurs provenant de l’intestin, ce qui s’accompagne de réactions inflammatoires dans la paroi intestinale et le foie.

Les bactéries intestinales probiotiques ne peuvent se développer que si elles sont bien nourries. Les bactéries intestinales probiotiques sont maintenues par une alimentation riche en fibres.

Ces souches bactériennes probiotiques utilisent certaines fibres non digestibles comme aliments et les fermentent afin de produire des produits de conversion, à leur tour importants pour la santé des cellules intestinales et bénéfiques pour le foie.

Ces fibres – les prébiotiques – sont transformées en acides gras à chaîne courte. Il s’agit d’acides gras volatils, tels que l’acétate, le propionate et le butyrate. Le butyrate (ou l’acide butyrique) est le nutriment préféré des cellules du côlon. Par ailleurs, le butyrate a un effet anti-­inflammatoire et favorise ainsi la santé des cellules intestinales. Chez les patients atteints du syndrome du côlon irritable (SCI), une pénurie de butyrate peut être la cause de jonctions serrées endommagées et, en fin de compte, d’une hyperperméabilité intestinale.

Chez les personnes atteintes d’eczéma (dermatite atopique), les prébiotiques ont pu réduire la perméabilité intestinale. Les acides gras à chaîne courte maintiennent la santé des jonctions serrées grâce à leur effet bénéfique sur les protéines des jonctions serrées (protéines TJ) et claudines.

Le galacto-oligosaccharide (GOS) et le fructo-oligosaccharide (FOS) sont des fibres prébiotiques. Le Lactobacillus plantarum est une bactérie lactique probiotique qui peut avoir un effet bénéfique sur le maintien ou la restauration de la barrière intestinale. L’administration du L. plantarum chez des volontaires en bonne santé a résulté en une augmentation des protéines TJ dans les jonctions serrées, ce qui indique une amélioration de la stabilité et de la résistance contre les effets néfastes des jonctions serrées endommagées par entre autres les substances signal inflammatoires, les toxines et les bactéries nocives. Dans une étude expérimentale, le L. plantarum a également été capable de protéger les jonctions serrées contre les dommages chimiques (causés par les médicaments). l

Facteurs de l’hyperperméabilité intestinale

Facteurs externes

• Les aliments riches en graisses (saturées) ou en fructose

• Les allergies alimentaires (gluten…)

• Les modifications de la flore intestinale

• Le stress physique comme les efforts physiques excessifs (sport de haut niveau)

• Les acides biliaires

• Les maladies inflammatoires de l’intestin

• Les médicaments : les AINS (antidouleurs, anti-inflammatoires comme l’aspirine, le diclofénac, le naproxène, l’indométacine) ; les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) comme l’ésoméprazole

Facteurs internes

• Les processus inflammatoires chroniques

• Une mauvaise circulation de la muqueuse intestinale

• Les médicaments (AINS, chimiothérapie)

• Le diabète

• L’histamine, la sérotonine, les protéases

La N-acétyl cystéine (NAC)

La NAC est un antioxydant important et augmente les niveaux de glutathion, un antioxydant dans les cellules de l’organisme. Elle prévient les dommages causés par les radicaux libres dérivés de l’oxygène (stress oxydatif) aux jonctions serrées de la barrière intestinale et de la couche muqueuse. Cela peut se produire lorsque la circulation sanguine dans la muqueuse intestinale est temporairement perturbée. L’utilisation d’AINS (antidouleurs et anti-inflammatoires comme l’ibuprofène ou le naproxène) peut également réduire temporairement la circulation sanguine dans la muqueuse intestinale par vasoconstriction locale, ce qui endommage la barrière intestinale. Chez les patients traités avec une combinaison de glutamine, de zinc et de NAC pendant douze à quatorze mois, la densité des jonctions serrées et des processus inflammatoires de la muqueuse intestinale s’est améliorée.

Ces conseils ne vous dispensent pas de consulter en premier lieu un médecin pour établir un diagnostic. Vous pouvez également vous faire accompagner par un thérapeute en médecine complémentaire. Pour en trouver un près de chez vous, rendez-vous sur annuaire-therapeutes.com